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II
au long de ma mort j’aurais tout le temps nécessaire
la lenteur m’ouvrira ses bras
vous me coucherez sur son grand corps
vous me coucherez sur son grand corps comme je me suis couché sur le corps de l’amour
mais sans impatience
sans frémissement
sans extase
avec seulement le grand battement silencieux de mon âme
avec seulement le grand battement silencieux de mon âme qui continuera son voyage
immobile enfin
je saurai attendre
I
au départ de la voyageuseson regard sonde les ténèbresdes vies à naître se croisentdans le silence qui les précèdel'horizon s’instable
elle décrypte les ondes de l'amour
en zone d'ombreune femme lente et longue déserte l'inconfort sillonne les espaces inséparables
un femme lente et longue peuple le temps profondattentive au pays qui se taitelle veille sur les collines sans histoirenomme la plaine absente et le vert des prés enclos
au pays sans abrila forêt est légendeet sa faune et sa floresans aires et sans souches implosent en secret et grandesquelque part sans ellele vent recense chaque pierre qui frissonne dans le silence
ses fissures et ses roncesune parole
une parole et une lanterne l'accompagne dans la nuit verrouillée
IX
un ami me l’a dit
je l’ai lu dans le journal
c’est donc vrai ce petit bois près d’ Alleins
la source graillonneuse
la clairière de septembre
les foins en rouelles
la faneuse rouillée
et ton ombre si légère pendue sous la lune
je ne demande pas pourquoi
je ne demande rien
chacun tombe soudain comme un vent hors d’haleine
si tu m’avais appelé
si tu m’avais écrit
j’aurais pris sur moi ta chance perdue
j’aurais pris le temps de vivre comme tu n’as pas vécu
mais tu ne pouvais plus percer ta détresse
on a sa fierté
on ne se jette pas contre les portes comme un mendiant
on a sa pauvreté sa peau à porter on y reste
que veut-il celui-là son pain de tendresse les miettes d’amitié
il apporte l’espoir mais il oublie la justice
je t’aurais parlé d’une patrie à partager comme une eau froide
après la fonte des neiges après la patience de se taire
je t’aurais montré ton visage tes années au front des ruelles mouillées
j’aurais mis ta main sur la mousse des humains si douce à la terre
j’aurais gagné un jour
l’espace de renaître
j’aurais gagné un jour
j’aurais gagné un jour peut être
VIII
tu te diriges vers la porte phosphorescente
et cela fait un rendez-vous
demain à telle heure sautante
je viendrai plus seul que je ne suis sans toi
avec ma figure méconnaissable
dans mes habits d’emprunt
je me suis déjà caché dans les bois
je me suis déjà caché dans les fossés
j’ai déjà provoqué en toi le rire
l’incrédulité
je serai cette fois celui que tu n’as pas connu
et qui n’aime qu’à te surprendre
le regard que je jetterai sur tes épaules
sera comme une pluie d’éclipse
il descendra lentement de son cadre solaire
mes bras autour de ton cou
je t’apparaîtrai avec mes mains sur tes yeux
et tu ne pourras rien prendre
l’amour s’étendra comme je t’aime