samedi 29 décembre 2007

V

je commence à bercer mon temps
j’ai couturé un vêtement de tes absences
je l’ai revêtu contre le mal
contre la faim


j’ai cueilli des fleurs apaisantes pour chanter la soif qui pleurait si bien
j’ai coiffé mon front de collines blondes
j’ai tout changé

j’ai mené paître mes désirs à pas de chagrin
dans les plaines rondes où le soleil est pour demain
avec des brins de toi au vent volés l’un après l’autre

j’ai bâti une route qui double les oiseaux vers l’Est

sans aucune fatigue
dans le ciel

dimanche 23 décembre 2007


IV

je cherche ton regard comme un aveugle cherche le monde qu’il a perdu
ce grand regard qui vient vers moi m’apporter celui de toutes les femmes

il est pour moi beau comme un de ces couchants devant lesquels on s’arrête de respirer
et je ne vois plus rien de ce cette mer naissante à nos pieds pour rejoindre l’horizon

je ne retrouve plus ton regard dans mes mains
et pourtant elles l’ont tenu comme on tient les brassées d’herbes dans le soleil au moment où la terre se roule dans l’été

je cherche ton regard au fond de mes nuits
dans toutes les vitrines où il s’est miré
mais il ne me reste rien de lui
pas même ces larmes qui ont glissé d’entre mes doigts

samedi 15 décembre 2007

III

c'était dans un pays d'avant l'exil et de naguère
et je ne savais plus combien de temps à vivre il me restait

un vieux pays d'eaux mortes et de fleurs séchées
une contrée lointaine autrefois une patrie

bien au-delà des fleuves qui charrient les glaces

et l'ancienne maison où dorment au soleil les roses trémières
maison d'enfance et de mémoire


et cette odeur en moi des menthes sauvages

samedi 8 décembre 2007

II

ce qu’il faut de douceur pour rester doux parmi les autres
ce qu’il faut savoir danser une danse où à deux pas en avant succède un pas en arrière

ce qu’il faut d’absence au milieu du désir pour rester fidèle à un souvenir
qui est à la fois un visage de jeune fille
un fleuve sous la lune
une promesse


ce qu’il faut de fidélité à une tombe
son bouquet de neige
pour quitter un jour la tendresse
et vouloir changer la brutalité du monde

samedi 1 décembre 2007

A PERTE DE VUE


I


amenez moi la femme qui a connu la foudre
élevée feuille par feuille dans le printemps des villes
(elle joue à l’ange sous la pluie)

amenez moi la veuve au sourire effondré
amenez moi la fille difficile à rejoindre

et que je n’entende plus
une fois rentré dans l’ombre
la plainte confuse des bars

mais cette joie terrible qui monte des collines pour saluer l’orage