samedi 27 octobre 2007

A Aurore et Léo…


IV

je laisserai en partant la lumière allumée
comme pour éclairer mon absence
éclairer mon je ne suis plus là
et ourler d'or l'ombre du je suis pas encore parti

pour vous faire croire à tous les deux
au trouble clair d'une lueur de lampe
que de ne plus être là
c’est d'y être encore

vendredi 19 octobre 2007


III
faut pas pleurer comme ça le ciel
les oiseaux deviennent lourds
ils se font doubler par les Mirages 2000 N

faut pas gronder comme ça non plus
ce ramdam a dessiné tant de nuages
on n'y voit plus rien et tu ne m'entends pas

en bas
il y aura trop de bruit de pétrole
dans l'écho des enfants affolés
si tu t'écroules égarant le soleil

faut pas pleurer comme ça tu sais
tu fais grelotter les fourmis noyées sous les bombes

t'en fais pas trop non plus pour les hommes
ils sont fous depuis le Big Bang


restent juste quelques poètes
pour vouloir que les fleurs ne fanent jamais

jeudi 11 octobre 2007

II

encore un versant d’acacias
une route presque une syllabe
la clairière s’est dénouée
ciel tout à coup et nudité
la plage sans désolation

sable sans éraflure

un mouvement dans les profonds paysages qui s’étendent
jardin et lointain emportés

le cri le linge les dahlias épars
chaque fois la sirène d’alarme après
chaque fois nos larmes et tout dérapait

l’ombre m’abandonne
entre enfance et frémissement
entre enfance et frémissement que le silence fuit

mercredi 3 octobre 2007

JE LAISSERAI L'OMBRE

I
après la guerre* nous avons faits le ménage
l’ordre quel qu'il soit ne se fait pas tout seul
nous avons repoussés les gravats sur les bords des routes
pour laisser passer les voitures remplies de cadavres

nous nous sommes embourbés dans la fange et la cendre
les ressorts de canapésles échardes de verre
et les chiffons sanglants

nous avons traînés une poutre pour soutenir le mur
vitrés la fenêtre et raccrochés la porte sur ses charnières

ce n'était pas photogénique
alors toutes les caméras sont parties pour une autre guerre

il fallut refaire les ponts et les gares
les manches s'effilochèrent à force d'être retroussées

quelqu'un le balai à la main se souvient encore de comment c'était
un autre l’écoute acquiesçant de sa tête presque intacte
mais déjà à côté d'eux il y en a qui s’ennuient
quelqu'un parfois encore déterrera de dessous un buisson des arguments rongés par la rouille et les portera sur un tas d'ordures

ceux qui savaient de quoi il s'agissait ici doivent céder la place à ceux qui en savent peu
et moins que peu
et enfin rien du tout

dans l'herbe qui a recouvert les causes et les effets
je me suis coucher un épi entre les dents
puis j’ai baillé aux corneilles
dans les nuages







* Sarajevo 1995